Depuis plusieurs mois, j’ai le bonheur d'écrire un article, chaque semaine, pour vous donner des conseils inspirés de mon travail de physiothérapeute. Vous avez été nombreux à m’écrire et je sais que plusieurs d’entre vous ont déjà eu recours aux services d’un physiothérapeute. Que les traitements soient donnés en clinique privée, en milieu hospitalier ou dans un centre de réadaptation ; la physiothérapie est bien entendu connue et reconnue pour son efficacité à traiter les douleurs au dos, au cou ainsi que les blessures articulaires, mais plusieurs aspects de la profession demeurent encore méconnus. Ceux-ci sont surprenants, captivants et je suis persuadé que certains d’entre eux pourraient fort probablement être utiles, à vous, votre famille ou l’un de vos proches. Voici 8 façons de pratiquer la physiothérapie qui me tiennent particulièrement à coeur.
1. Avant même la date prévue de votre naissance
Certains bébés naissent prématurément. Plusieurs parties de leur corps n’ont pas encore atteint leur maturité, comme les poumons et le système nerveux. Les physiothérapeutes leur viennent en aide en utilisant leurs mains, leur stéthoscope ainsi que la justesse de leur sens de l’observation. Ils les aident ainsi à mieux respirer, à mieux bouger et à découvrir de nouveaux mouvements et de nouvelles positions. En ce qui me concerne, je ne m’habitue jamais de voir de si petits corps et d’utiliser mes mains pour estimer la qualité de leur respiration ou leur mobilité. C’est touchant, dans tous les sens du terme. On bouge doucement leur cage thoracique, leurs bras, leurs jambes. On stimule leurs muscles. On favorise le drainage des sécrétions. Et il y a aussi le bon positionnement qui nous préoccupe. À cet âge, les bébés bougent relativement peu par eux-mêmes. Un positionnement adéquat permet d’éviter certains impacts négatifs de l’immobilité comme une modification de la forme du crâne; les os de celui-ci n’étant pas encore complètement soudés. À cet égard, l’enseignement aux parents est indispensable à la poursuite à la maison des efforts entrepris à l’unité de néonatalogie.
2. À cheval
Avez-vous déjà pensé faire de la physiothérapie à cheval? L’hippothérapie est une modalité thérapeutique qui est utilisée en réadaptation dont le principe fondamental est de tirer avantage de la façon de bouger du cheval qui, sous certains aspects, reproduit des mouvements relativement semblables à ceux de l’être humain. L’hippothérapie permet de stimuler et d'améliorer notamment la posture, l’équilibre, la coordination ainsi que les transferts de poids de gauche à droite, des composantes indispensables à la vie de tous les jours. Cette forme de thérapie est toutefois réservée aux physiothérapeutes, aux ergothérapeutes ainsi qu’aux orthophonistes ayant reçu la formation requise. Tant les adultes que les enfants peuvent en bénéficier. Notez qu’il existe quelques contre-indications comme l’ostéoporose sévère et la hernie discale symptomatique ou multiétagée. Pour en connaître davantage sur l’hippothérapie, consultez le site de la Fondation Hippo et la Fédération québécoise d’équitation thérapeutique.
3. Après le feu
Les brûlures peuvent avoir de graves conséquences, notamment une diminution de la mobilité de la peau et des articulations; l’atteinte étant d’ailleurs souvent plus marquée chez les enfants puisqu’ils sont en pleine croissance. Le traitement des brûlures en physiothérapie se fait en partie dans un bain, ce qui permet de retirer plus facilement les pansements, de nettoyer les plaies et d'utiliser la résistance de l'eau pour bouger les articulations et faire des exercices. Le physiothérapeute veille aussi, tout au long du suivi, à minimiser les effets dommageables de l’alitement prolongé et il s’assure de récupérer les capacités fonctionnelles de la personne, non seulement pendant l’hospitalisation, mais aussi après le retour à la maison. La physiothérapie se déroule toujours en étroite collaboration avec la clinique de la douleur ainsi que les médecins, les infirmières, les psychologues et les ergothérapeutes.
4. Dans la bouche
L'articulation de la mâchoire est l'une des plus utilisées du corps humain. Qu'arrive-t-il lorsqu'elle nous joue un tour en ne bougeant pas normalement? Ça craque, ça bloque et ça fait mal. Bien sûr, la dentisterie est la discipline dont l'intervention s’exerce principalement dans la bouche. Or, les physiothérapeutes s'intéressent eux aussi à la bouche, d’autant plus que les problèmes de mâchoires sont souvent associés à des problèmes au cou, des raideurs aux épaules ainsi que des migraines et des problèmes posturaux. Les physiothérapeutes spécialisés dans le traitement de l'articulation de la mâchoire (l’articulation temporo-mandibulaire) travaillent en collaboration avec une équipe médicale formée de médecins et de dentistes, en pratique générale ou spécialisée. Ils évaluent et traitent la mobilité comme l’ouverture de la bouche, la force et la souplesse des muscles de la mâchoire ainsi que ceux des régions avoisinantes. Cette forme de thérapie pourrait vous permettre, par exemple, de vous débarrasser de certains bruits articulaires, de bâiller sans craindre que votre mâchoire se bloque en ouverture ou de mordre plus facilement dans une pomme.
5. Des deux côtés du bedon
Le corps des adolescents se modifie à une vitesse folle, certes, mais selon moi, la rapidité à laquelle les changements surviennent durant la grossesse est encore plus impressionnante. Ceux-ci concernent entre autres la souplesse, la posture et la prise de poids. Cette métamorphose entraîne quasi systématiquement des douleurs articulaires, dont les plus fréquentes se situent au bassin et au bas du dos. Ces douleurs ne sont pas toujours invalidantes, heureusement d’ailleurs, mais elles contribuent souvent à diminuer la qualité de vie, notamment en perturbant le sommeil. Le physiothérapeute spécialisé en obstétrique prévient et traite la douleur des femmes enceintes ou ayant accouché, donne des conseils posturaux, enseigne un programme d’exercices et parfois suggère l’utilisation d’une ceinture pelvienne. Est-ce que les douleurs dues à la grossesse partent systématiquement après l’accouchement ? Non. Dans certains cas, elles persistent durant des mois, sinon des années. Il est donc approprié d’offrir un suivi post-partum afin d’agir rapidement sur la douleur, l’intégrité des muscles abdominaux ou la persistance des signes d’incontinence.
6. À la salle de jeu
Les enfants apprennent naturellement à ramper et à marcher, puis à courir et à sauter. Et si cela s’avérait pour chacun d’eux, tout serait parfait dans le meilleur des mondes. Or, la réalité est bien différente. Certains ont besoin d’aide, de petits trucs, d’aides techniques comme un déambulateur ainsi que des exercices faits en thérapie et à domicile. Les tout-petits peuvent alors intégrer plus rapidement de nouvelles façons de bouger, qui leur serait parfois impossible ou difficile d’acquérir autrement. Les enfants traités en physiothérapie reçoivent des diagnostics semblables à celui des adultes comme une fracture ou une tendinite, mais aussi des diagnostics plus complexes tels un torticolis congénital ou une condition de santé qui exigent un suivi à long terme comme la trisomie, la paralysie cérébrale ou la dystrophie musculaire. Nos outils d’interventions sont très diversifiés et incluent le hochet, les ballons, les voiturettes, en passant par le trampoline, le vélo stationnaire, les poids et haltères et surtout, nos yeux et nos mains.
7. Quand ça tourne
Pourquoi les patineurs artistiques n’éprouvent-ils pas de nausées ou d’étourdissements lorsqu’ils tournent sur eux-mêmes ? L’explication est relativement simple : ils se sont habitués à cette forme de stimulation, notamment grâce aux capacités d’adaptation (ou d’habituation) du cerveau et du système vestibulaire. Les physiothérapeutes qui pratiquent la rééducation vestibulaire utilisent justement cette capacité d’adaptation pour traiter les problèmes d’étourdissements et de vision floue comme les vertiges, la maladie de Ménière et les séquelles de labyrinthite. Les problèmes vestibulaires peuvent être entre autres causés par un accident de voiture, la présence régulière de vibrations au travail, le vieillissement ou un dérèglement des centres de l’équilibre comme si de petites roches venaient modifier le fonctionnement normal de l’équilibre. Le traitement inclut des mouvements précis de la tête et des exercices spécifiques faits en présence du physiothérapeute et à la maison. Les résultats sont souvent impressionnants; un ou deux traitements peuvent parfois suffire à régler la situation ou à diminuer significativement les symptômes. La thérapie tiendra compte de différents aspects comme la vision, les mouvements de la tête et du corps ainsi que des centres responsables de l’équilibre qui se situent près de l’oreille et à l’intérieur du cerveau. Notez que ce type de problèmes touchent les personnes de tous âges, notamment les enfants, les personnes ayant subi une commotion cérébrale ainsi que les personnes âgées. D’ailleurs, celles-ci ont un risque de chute jusqu’à 12 fois plus élevé si elle souffre d’un problème vestibulaire non traité.
8. Pour mieux vivre avec le sida
Depuis quelques années, le sida est davantage perçu comme une maladie chronique. Plusieurs de mes collègues traitent des personnes qui en sont atteintes et cette question leur est régulièrement posée: quels sont les liens entre le sida et la physiothérapie? Le sida s’attaque au système immunitaire et il a des conséquences multiples et à long terme, notamment dû aux effets secondaires de la médication. La physiothérapie peut apporter sa contribution en améliorant la respiration, la force musculaire, l’équilibre ou la coordination. Le sida peut aussi faire des dommages au cerveau. Cet aspect de la maladie concerne les adultes et, tristement, les enfants. Ceux-ci réagissent de façon complexe à une atteinte cérébrale parce que leur cerveau est en plein développement. Par exemple, l’apprentissage de la marche peut être plus longue et nécessiter une stimulation particulière. Le sida est aussi associé à la toxicomanie et à des problèmes sociaux. L’intervention prend alors une ampleur considérable et requiert les soins d’une équipe interdisciplinaire dont les discussions et décisions sont souvent immensément complexes et soulèvent des enjeux éthiques, monétaires et personnels.
Je remercie les personnes suivantes pour leurs conseils lors de la rédaction de cet article:
Jessica Gennaoui, physiothérapeute au CHU Sainte-Justine;
Maude Laliberté, physiothérapeute, consultante en éthique et professeure adjointe à l’Université de Montréal;
Patrick Doiron-Cadrin, physiothérapeute spécialisé en rééducation vestibulaire et rédacteur en chef du magazine Parallèle
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Voici des coordonnées qui pourraient vous être utiles. Il s’agit de deux regroupements de physiothérapeutes ayant d’ailleurs des rôles forts différents.
L’Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec: tous les physiothérapeutes, sans exception, doivent être membres de l’Ordre afin de pratiquer la physiothérapie en toute conformité. L’Ordre a pour principal mandat de protéger le public et de s’assurer du respect du Code de déontologie des physiothérapeutes et des thérapeutes en réadaptation physique. Vous y trouverez un outil de recherche afin de trouver un physiothérapeute selon vos besoins et de votre localisation géographique.
La Fédération des cliniques privées de physiothérapie du Québec: cette fédération regroupe plus de 230 cliniques privées de physiothérapie localisée sur l’ensemble du territoire québécois. Vous y trouverez un outil de recherche afin de trouver une clinique privée près de chez vous.
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Denis Fortier est physiothérapeute et l'auteur du livre Conseils d'un physio, publié aux Éditions Trécarré. Il est possible de vous le procurer en librairie et en pharmacie. Vous y trouverez une multitude de conseils, plus de 50 exercices thérapeutiques, des façons simples de diminuer vos douleurs ainsi que 10 auto-évaluations qui vous permettront de mesurer notamment votre mobilité, votre force et votre souplesse.
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